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« Previous Page Table of Contents Next Page »était capable de faire du vin avant d’être libéré. Mais de la diffculté surgit parfois l’espoir : 2006 est devenue l’une des plus belles vendanges de la décennie écoulée au Château Kefraya.
Les vins libanais sont faciles à trouver en Europe, et ce n’est pas si surprenant. “Il sufft de voir combien de restaurants liba-nais il y a en France. Ils apprécient tous de pouvoir servir un vin libanais à leurs clients.” Mais ce n’est pas la seule raison. “Je travaille de préférence avec des œno-logues français. Après Yves Morard , c’est
Jean-Michel Fernandez , qui a acquis ses lettres de noblesse au Château Ci-tran (Médoc), puis Fabrice Guiberteau , qui sont venus.
Les vins de Kefraya sont parfois comparés à des Côtes-du-rhône, même si cette ré-gion ne jouit pas de 300 jours d’ensoleil-lement, comme la Bekaa. “Le vin libanais est caractérisé par de puissants aromes d’herbes sauvages,” explique M. de Bus-tros. Cela le rapproche des crus français méridionaux. En blanc, on y cultive des cépages que l’on trouve aussi dans le sud de la France : chardonnay, viognier, sau-vignon blanc et muscat petit grain. En rouge, cabernet sauvignon, syrah, cari-gnan, mourvèdre, cinsault et cabernet franc tiennent la vedette. “En effet, en matière d‘utilisation des cépages, nous jouissons d’une plus grande liberté que nos amis français. L’un de nos meilleurs vins est un assemblage peu orthodoxe de syrah et de cabernet sauvignon,” ex-plique-t-il encore.
Pour sa gamme supérieure, M. de Bus-tros exploite tout le registre de la qualité : vendange manuelle, sélection, élevage en fûts de chêne, et après l’embouteillage, un vieillissement supplémentaire dans une excellente cave bien fraîche, à moitié creusée dans la colline. Les résultats sont à l’avenant et on peut certainement en dire autant de Massaya, le domaine que veulent visiter tous les occidentaux qui viennent ici.
Château Massaya
Massaya est une ‘boutique winery’ fran-co-libanaise dans la Bekaa. Ceux qui viennent déguster le vin ici pourraient presque se croire dans un centre de bien-être. Dégustations paisibles devant le feu ouvert. Brunch le dimanche. Bouquets de lavande devant la porte. Tourterelles. Un restaurant. En 2005, The New York Times l’avait déjà qualifé de domaine viticole le plus branché du Liban, ne fût-ce que parce que les propriétaires se sont forgés un style de vie qui correspond à celui de la plupart des amateurs de vin. Un chemin entre les vignes, toujours avec les montagnes pour décor, nous emmène vers une maison qui ressemble à une sorte de maison d’artiste en Provence. La lavande sèche sur une belle table en bois sur la terrasse. Via la terrasse, nous accédons également à une cave sombre et au local de dégustation, visible au travers des vitres foncées. Le restaurant du Châ-teau Massaya est connu dans tout le pays. A Beyrouth, on l’appelle le Tanail Place.
Il faut réserver au moins une semaine à l’avance, certainement pour le brunch du dimanche.
Tout semble donc aller pour le mieux dans le meilleur des mondes, mais la vie des propriétaires, les frères Sami et Ram-zi Ghosn , n’est pas un long feuve tran-quille. En 1975, la famille Ghosn fut obli-gée de quitter le pays. Elle s’est exilée en France et aux Etats-Unis, mais les frères sont revenus en 1992. Ils ont observé ce qui subsistait du domaine familial et en ont conclu que tout était à refaire. En partenariat avec les Français Frédé-ric et Daniel Brunier (cfr Vieux Télé-graphe , Châteauneuf-du-Pape) et Domi-nique Hébrard (ex-Cheval Blanc), ils ont reconstruit le Château Massaya. On ne s’étonnera donc pas si le style de vie fran-çais s’est enraciné ici. Selon des habitudes provençales, la journée de travail est inter-rompue par de longs déjeuners, au cours desquels on ouvre régulièrement une
bouteille de Massaya Silver Selection , un assemblage de 40% de cinsault, 30% de grenache, 15% de cabernet sauvignon et 15% de mourvèdre. La différence entre les millésimes est prononcée, mais la base est toujours un savoureux mélange de fruits mûrs et d’épices, dans un vin qui a beau-coup de corps. C’est un vin chaleureux et magique, qui est élevé exclusivement en chêne français et qui est commercialisé au plus tôt 21 mois après la vendange. Mais lorsqu’on demande à Sami quel vin refète le mieux son terroir, il opte pour le Massaya Classic , un vin sans chichis. L’assemblage comporte également une petite part d’ obaideh , un cépage autoch-tone qui est traditionnellement utilisé pour la production d’ arak , un alcool local aux accents anisés. Hélas, ce vin n’est pas exporté. Pour le moment, on ne peut le déguster qu’au domicile des frères Ghosn. A nos yeux, c’est certainement un bon prétexte pour y revenir un jour ! Le GoldReserve deMassaya , vous l’aurez deviné, est le meilleur vin de la maison. Il est conçu comme un vin de garde: c’est un assemblage de 50% de cabernet sauvignon,
40% de mourvèdre et 10% de syrah, non fl-tré. Le moins que l’on puisse dire, c’est que ce vin possède une superbe profondeur. Ici, 80% de la production est exportée. Avec Musar, Massaya est probablement le meilleur projet du Liban. Sami et Ramzi en sont fers, mais sont égale-ment conscients du fait que la précarité de la situation politique peut à nouveau les contraindre à quitter le pays. Pour le moment, l’amour du pays les garde à Massaya. “Jusqu’à présent, nous avons toujours trouvé une manière de survivre. Au Liban, cela s’apprend,” affrme Sami. A l’instar du temple de Bacchus, qui a résis-té à l’usure du temps, la vigne ne se laissera pas refouler du jour au lendemain. Ici, le vin continuera toujours à couler à fot, même si les serveurs doivent les sortir comme par magie du fn fond de leur poche.
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Le Château Kefraya
Sami & Ramzi Ghosn
Lavande sur la terrasse de chez Massaya
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