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Producteurs et distributeurs demandent depuis longtemps de pouvoir utiliser un logo «bio» européen pour le vin. Actuellement, la seule mention autorisée ‘vin issu de l’agriculture biologique’ ne concerne que les raisins.

En juin 2010, la Commission européenne a retiré une proposition de compromis, en raison de l’impossibilité d’arriver à un accord entre les états membres sur des sujets clé. D’une part, l’Allemagne et d’autres états membres ne voulaient pas de mesures plus contraignantes pour la teneur en anhydride sulfureux des vins bio, d’autre part les pays du Sud considéraient inacceptable que les vins bio puissent contenir les mêmes doses de SO

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que les autres vins.

Une nouvelle règlementation a été récemment proposée. La différence par rapport à la version précédente consiste à permettre l’addition plus importante de SO

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pour les vins contenant du sucre résiduel. Ce compromis pourrait convaincre les vigne-rons allemands, nombreux dans ce segment de production, à accepter cette nouvelle réglementation qui reste fdèle à l’esprit du législateur visant à réduire l’ajout de subs-tances étrangères au vin. Les exigences de limitation du SO

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seraient plus souples pour les vins du nord, même s’il n’existe pas de base scientifque pour déterminer ce critère, en effet le dosage du SO

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dépend plus du type de vin que du climat. Il semble en tout cas que tous aspirent au logo européen « bio » pour le vin, à la place de la mention vin issu de l’agriculture biologique. En tant que consommateur, je me demande si c’est la meilleure solution?

Il y a trois possibilités pour défnir un vin bio (évidemment, toujours à partir de raisins bio):

• Vin vinifé avec les mêmes règles que les autres vins, comme c’est le cas actuelle-ment pour les vins issus de l’agriculture biologique.

• Vin sans ajout de substances étrangères au vin, dans les règles strictes du bio. • Situation intermédiaire, interdiction de certains additifs et limitation d’autres. La première possibilité n’est guère acceptable. Il serait étonnant que les raisins bio soient traités avec des résines d’échange cationique, matières plastiques, et pas mal d’autres pratiques légales mais pas très ‘naturelles’ qui sont monnaie courante dans l’industrie du vin. La deuxième a été vite écartée, en effet dans l’état actuel, il n’est pas possible produire des vins de niveau qualitatif compétitifs sans l’ajout de SO

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. En principe, il ne reste donc que la troisième possibilité, celle qui a été proposée, mais qui ouvre les portes à un débat agité sur les substances acceptées et leur dosage, vu que tous compromis sur ce sujet seront par défnition arbitraires.

Il y a peut-être d’autres solutions. Par exemple, aux Etats-Unis, il y a des vins vini-fés ‘normalement’ à partir de raisins bio, certifés vins issus de ‘organically grown grapes’. Mais il y a aussi les ‘organic wines’, pour lesquels l’ajout de sulftes est tout simplement interdit (approche plus stricte que pour les vins biodynamiques, pour lesquels jusqu’à 100 mg de SO

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sont acceptés). Apparemment, cette classifcation ne provoque pas de confusion pour le consommateur américain, puisque les marchés des deux catégories progressent bien. Un nombre croissant d’amateurs de vin appré-cient que le produit bio soit différent tant sur l’étiquette que dans le verre. Certains producteurs, comme Frey en Californie, déclarent qu’on n’a pas besoin de SO

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pour conserver le vin. Il y a aussi des techniques physiques, comme le ‘Pressure Change Technology’, qui pourraient remplacer le SO

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. Mais dans la plupart des cas, un vin fruité sans sulfte a une durée de vie de quelques mois, alors qu’un vin sulfté peut garder son fruit pendant quelques années. Est-ce grave? Il ne serait pas étonnant que les amateurs de vin nature acceptent la recommandation de boire ces vins dans les cinq mois qui suivent les vendanges. En fait, une date de péremption pour le vin n’est pas nécessairement négative, elle exprime le concept d’un produit vivant. Rappelons le succès du Beaujolais Nouveau au siècle passé, pour des raisons bien différentes, la période très restreinte pour la consommation était liée à son succès. Se passer de SO

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pour des vins vieillis en bois ou contenant du sucre résiduel coûte beaucoup plus cher. Enfn, un vin bio «strictu sensu» est diffcilement compétitif par rapport aux vins fruités conventionnels bons marchés. Est-ce une raison suffsante pour relativiser la défnition du vin bio plutôt que de créer une défnition solide, en gardant en même temps le label ‘vin issu de l’agriculture biologique’ ? Une catégorie de vins vraiment bio pourrait jouir d’un certain prestige auprès des amateurs, et inci-terait la recherche scientifque à découvrir des solutions alternatives au SO

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. En ma qualité de passionné, cette opinion est strictement personnelle, et je reconnais que d’avoir deux catégories des vins bio au lieu d’une peut poser des problèmes, mais à mon avis les avantages d’une telle approche ne sont pas négligeables.

Vin bio,

ce sera quoi ?

Pedro Ballesteros MW

Pedro Ballesteros est Ingénieur Agronome, Master en Viticulture et

en Oenologie, Weinakademiker à Geisenheim et il est un des trois «Masters of Wine» qui habitent la

Belgique.

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