Page 35 - Flipbook VINO 5-2011 FR (2)

Je l’avais rencontré pour la première fois il y a environ 16 ans lors d’une dégustation à l’aveugle comparative de très bons vins, avec en outre un Torrès Mas la Plana et un Reserva Real opposés à un ‘Latour’ et un ‘Lafte Rotschild’. Miguel Torrès avait pré-senté sa dégustation avec une certaine assu-rance. Son audace m’avait d’ailleurs forte-ment marquée. Ici, je me retrouvais donc à nouveau au Miguel Torrès Wine Course 2011. Le cours d’œnologie dans la maison-mère, donné par Miguel Torrès lui-même, était en soi déjà prometteur. La manière dont il transmet sa passion montre claire-ment qui il est. L’explication n’était pas trop commerciale - cela l’a été plus tard mais pas dans le message de Miguel. Il a parlé de sa-voir-faire, de patrimoine liquide, de tech-niques adjacentes, de choix de cépages et d’économie d’énergie.

La visite à une de leurs récentes acquisi-tions, Jean Léon , a fait sentir la puissance de l’infuence du Bordeaux à la fn des an-nées soixante. En tant que pionnier, Jean Léon a planté le premier Cabernet à Pe-nedès et a obtenu de bons résultats. De nos jours, les vins sont toujours vinifés à la française et se révèlent meilleurs que pré-vus. Mon plus haut score a été attribué au

Les vins les plus beaux et les plus intéres-sants de Torrès sont sans nul doute ceux du Priorat. Les Carignan et Garnacha juteux satisfont pleinement à mes critères de vin du terroir. Le sol d’ardoise confère à l’excel-lente cuvée Perpetual une note minérale et des acides vifs. Un vin charnu noir rouge très concentré regorgeant de fruits mûrs et disposant d’un bon potentiel de conserva-tion.

En ce qui concerne la gamme de base de Torrès, j’ai été surpris par la cuvée la plus simple «Vina Sol». J’ai également attribué un très haut score au Celeste (100% de tin-to fno) de Ribera del Duero. Le fruit noir mûr, le beau caractère épicé dans le nez et la concentration juteuse m’ont en effet convaincu. La cuvée Ibericos refète par-faitement la Dénominación Rioja. Une note de cuir rustique, de tomate séchée, un équi-libre et un caractère épicé dans la fnale. La

gamme Single Vineyard de Torrès peut sans hésiter être reprise dans la liste des grands vins du Penedès. Parmi les blancs, le clas-sique Fransola a davantage su me séduire que le Milmanda . Mais le plus élégant est le Pinot Noir Mas Borras . L’arôme de Kriek et le caractère épicé, les beaux acides pointus et la note légèrement fumée me font penser à un grand Bourgogne.

L’assemblage Grans Muralles est un vin noir rouge hyperconcentré. Des arômes de violettes et de baies de sureau. Le chêne donne à cette cuvée des allures de Parker mais le gagnant absolu est à nouveau le vin que j’ai découvert il y a 16 ans comme chal-lenger de Latour et Lafte: le Mas La Plana , un 100% Cabernet-Sauvignon. Cette cuvée profondément intense développe, à un âge relativement jeune, des arômes complexes de fruits des bois sauvages. Très intense mais beau en équilibre, avec des tanins dé-licats et des acides agréables.

De tous les Torrès non espagnols, un vin blanc a rehaussé mon opinion. Le Chardon-nay chilien Santa Digna Chardonnay . Le vin ne comprenait pas d’arômes de chêne et reste de ce fait étonnamment frais avec de belles notes fruitées et une acidité poin-

tue. La version Carmenère du même Es-tate constitue déjà depuis des années une bonne référence des notes d’eucalyptus et arômes balsamiques typiquement chiliens. La sueur de cheval animale, le tabac et le sirop pour la toux épicé sont typiques de ce cépage méconnu. Un autre vin de Tor-rès chilien «Manso de Velasco» n’était pas mal du tout. Le Cabernet profondément in-tense développe un arrière-goût épicé d’eu-calypstus. Cela m’a même fait penser à de l’anchois.

La visite fnale au Brandy Lodges est venue conclure ces 4 jours. Les Brandy espagnols me plaisent rarement vu qu’ils sont en gé-néral élevés sur du chêne américain et colo-rés avec du caramel. Pourtant, le Torrès 10 mérite une mention, ne fût-ce qu’en raison de son rapport qualité/prix (torréfaction, ta-bac et délicieux fruits secs). Le Jaime 1 est évidemment beaucoup plus complexe et plus délicat mais aussi plus cher.

A l’invitation de la frme Mafribel (nouvelle agence belge de Torrès), début juin, je suis descendu vers Villafranca del Penedès. Mes attentes concernant ce géant (représentant 7% de la production mondiale !) du vin étaient doubles. J’avais devant les yeux un gigantesque terrain industriel comprenant des fûts et un petit train touristique. Cela correspondait parfaitement à mes attentes mais je me réjouissais par ailleurs de me retrouver à nouveau en tête-à-tête avec Miguel Torrès en personne.